L’ADN ne sert-il qu’à prouver qu’on est coupable ?

C’est ce qu’on pourrait penser au vu de la majorité des cas relatés dans les médias. Chaque jour apporte son lot de meurtriers trahis par leur ADN, d’amants condamnés à payer une pension après un test de paternité, de fichages abusifs au FNAEG… Cette récurrence du test ADN et son poids dans les décisions judiciaires laisse globalement penser qu’il est un instrument à charge. On aurait tort de le penser, car il est avant tout un outil et dépend donc de l’utilisation qui en est faite.

C’est ce que veut prouver l’association américaine « Innocence Project ». Comme son nom l’indique, cette association indépendante intervient souvent pour innocenter des personnes déjà condamnées. Elle utilise pour ce faire la technique du test ADN, considérée comme la preuve reine au dessus même des aveux. C’est ce que prouve le cas de Damon Thibodeaux, qui est le 300ème condamné que l’association a réussi à innocenter grâce à un test ADN.

En l’espèce, Damon Thibodeaux était accusé du viol et du meurtre de sa cousine âgée de 14 ans. Après avoir avoué sa culpabilité pendant sa garde à vue, il a été condamné et emprisonné. Ce type de crime est susceptible d’entraîner la peine de mort aux États-Unis ; or, l’aveu des faits permet parfois de négocier une certaine clémence dans la condamnation, et peut parfois être un moyen d’éviter la peine capitale. Damon Thibodeaux s’est alors résignée à avouer le meurtre et le viol de sa cousine.

C’est pour cette raison, ainsi qu’au vu des nombreuses irrégularités contenues dans le dossier de Thibodeau, que Innocence Project a apporté sa contribution à l’enquête. L’association a ainsi déterminé que sur les 8h30 de garde à vue, seules quelques minutes avaient été enregistrées. Il est également fait état de pressions sur le suspect, que l’on a menacé de la peine de mort s’il n’avouait pas. Se sentant très fatigué, affamé et en état de stress intense, le suspect a fini par craquer et avouer un crime qu’il n’avait pas commis, aveux qu’il réfutera par ailleurs juste après dans la journée. La contre-enquête de l’association a même montré que contrairement à ce qui est dit dans les aveux, il n’y avait pas eu de viol. Le test ADN est venu confirmer toutes ces réfutations, en confirmant définitivement que Damon Thibodeaux n’avait rien à voir avec la scène du crime. Il sera donc libéré après 16 ans passés injustement derrière les barreaux, grâce à une analyse ADN effectuées plusieurs années postérieurement à sa condamnation en justice.

La plupart des cas où l’ADN innocente une personne sont beaucoup moins bruyants, ce qui donne l’impression que cette technique ne sert qu’à accuser et non à disculper. Or, c’est bien souvent lorsque l’ADN disculpe définitivement un suspect qu’il n’y a pas lieu d’aller au procès, et que les affaires ne font donc pas autant de bruit que les grands procès d’assises.