Le test de paternité rime-t-il toujours avec le test ADN ?

 

Quand on commande un test de paternité sur internet, on s’attend à recevoir un kit de prélèvement : écouvillons, enveloppes numérotées… tout évoque le test ADN. De même lorsqu’on est convoqué pour un test de paternité légal, on s’attend (et à juste titre) à se voir prélever ses empreintes génétiques dans un laboratoire agréé. Si l’on se voyait confirmer ou infirmer des liens de type père/enfant par la couleur des yeux, le groupe sanguin ou encore des témoignages concordants, on réclamerait corps et âme un test de paternité standard avec analyse de l’ADN. Pourtant, l’idée du test génétique n’est pas si évidente que cela, malgré son implantation (encore toute récente) dans les mœurs civiles et juridiques.

 

Lorsque le test ADN n’existait pas, il était quand même possible de déterminer certaines impossibilités. Dans l’affaire des bébés échangés à Cannes, c’est d’abord le teint hâlé de l’enfant qui a fait douter le mari. Dans cette même lignée, on a constaté certaines impossibilités dans les caractères transmis par les parents. Par exemple, des parents tous deux de groupe sanguin AA ne pourront logiquement pas avoir ensemble un enfant du groupe BB. Si le raisonnement n’est pas faux dans l’absolu, il reste problématique sur deux points :

 

– Les faux positifs : si deux parents de groupe AA ne peuvent avoir ensemble un enfant du groupe BB, il est tout à fait possible que le voisin, le garagiste, la boulangère… de ce couple soit de groupe AA, sans pour autant appartenir à leur famille ! Les méthodes de comparaison du groupe sanguin ou de la couleur des yeux ne fonctionnent donc que dans les cas d’exclusion (dire que X n’est pas le père de Y), et non pas dans les cas d’inclusion (dire que X est bien le père de Y) ; mais même dans ces cas d’exclusion, il reste encore quelques problèmes…

– Les faux négatifs : dans certains cas peu courants mais bel et bien existants, il se peut qu’un groupe sanguin ne semble pas correspondre à celui donné par les parents. C’est le cas de ce que l’on appelle le phénotype de Bombay, nommé d’après une région de l’Inde où on a justement découvert le phénomène.

 

D’un point de vue plus juridique, le test de paternité est un moyen de preuve parmi tous les autres. La preuve en la matière étant généralement libre, c’est surtout une question d’usage, de pragmatisme et de fiabilité du test ADN qui a mené à préférer le test de paternité tel qu’on le connaît aujourd’hui. Pourtant, il est tout à fait possible de prouver par d’autres moyens que l’on est pas le père d’un enfant, par exemple en prouvant que l’on ne pouvait être matériellement présent au moment de la conception de l’enfant. Inversement, il est aussi tout à fait possible de prouver (aux yeux du juge) la paternité d’un homme via des indices tangibles et concordants. Ce peut être le cas de déclarations par mail, courrier, SMS… ou le père présumé admet être le père de l’enfant, mais aussi de relations monogames où l’identité du géniteur ne fait aucun doute. C’est d’ailleurs généralement ce type de preuve qui est demandé pour introduire une requête devant le juge civil ; de là, ce dernier jugera opportun ou non de demander un test de paternité légal afin de confirmer ou infirmer les doutes alors exprimés.