Le 13 janvier 2015, France 5 diffusait un programme intitulé « Sois père et tais-toi ». Ce reportage suit le chemin de 5 hommes aux profils bien différents, sauf sur un point qui les relie et fait l’essence de ce travail : un test de paternité en justice les a forcé à reconnaître un enfant dont ils ne voulaient pas. La réalisatrice Lorène Debaisieux nous y montre une face encore occultée de ce qu’est le test de paternité judiciaire moderne. On y voit des interventions très sincères d’hommes forcés de reconnaître une filiation, parfois « piégés » selon leurs propres mots. C’est l’occasion de revenir sur l’essence même de ce qu’est le test de paternité : un test ADN parmi d’autres. Par conséquent, le test de paternité n’est pas moral en soi, c’est l’action en justice qu’il vient appuyer qui peut l’être ou non.

L’un des témoins raconte ainsi comment un jour, il a reçu un appel d’une ancienne conquête. L’histoire n’avait duré que quelques jours, ce qui a fait que notre homme est rapidement passé à autre chose. Il finit toutefois par recevoir un appel de cette compagne oubliée, qui dit en substance « je suis enceinte, et je vais garder l’enfant ». C’est ici que le géniteur ne peut plus rien contrôler. S’il nie les faits, un test de paternité ordonné par le juge pourra le reconnaître comme père de l’enfant. Et même s’il refuse de passer ce test (ce qui est tout à fait légal), le juge pourra déduire la paternité d’indices périphériques et de ce refus de passer le test. L’action devant le tribunal de grande instance est ici clairement orientée en faveur de la mère, puisqu’elle peut porter sa cause devant le juge civil pendant 10 ans après les faits. L’enfant, lui, peut réclamer cette action en recherche de filiation jusqu’à 10 ans après sa majorité, c’est à dire jusqu’à ses 28 ans. Il faut également préciser que dans le cas où l’enfant est mineur, c’est sa mère qui le représentera dans l’action en recherche de paternité puisqu’elle est réputée dans ce cas agir au nom de l’enfant. Techniquement, c’est donc une forme de délai supplémentaire dont dispose une mère pour demander à la justice d’établir la paternité de son enfant.

Cet intérêt de l’enfant est justement l’autre pierre angulaire de ce reportage. La loi choisit généralement le principe de responsabilité, peu importe les conditions de procréation, que le père ait le sentiment d’avoir été piégé, ou que reconnaître la filiation biologique réelle d’un enfant s’avère inopportun. C’est le droit d’avoir accès à ses origines qui est défendu pour l’enfant, alors qu’il peut avoir été très bien élevé par un responsable légal qui n’était pas son père biologique. Le test de paternité imposera alors sa vérité scientifique à une situation de fait qui convenait à la majorité des protagonistes. De leur côté, les hommes reconnus responsables après ces tests de paternité ont le sentiment d’être considérés comme de simples géniteurs destinés à payer une pension et des indemnités. La logique semble plus proche du « pollueur-payeur » que de l’équité pure, puisque la reconnaissance de paternité n’impose par exemple pas de droit de visite pour le père, malgré le versement d’argent qu’elle impose pour la mère et l’enfant.