Il n’existe techniquement aucune loi qui force un père présumé à se soumettre à un test de paternité qui lui est demandé (ni une mère par ailleurs). Des tentatives ont été faites au Sénégal ou au Maroc, mais elles sont restées sans suite. Pourtant, le ministre de la Santé avait lui même fait part de ses inquiétudes dans le dernier cas ; pour le Sénégal, il s’agissait d’un projet de loi visant à défendre les mères délaissées par le géniteur de leur enfant. De ces deux tentatives, aucune n’a abouti en raison de la protection des droits fondamentaux. Dans la mesure où l’intégrité du corps humain est généralement garantie par des normes constitutionnelles, il est assez difficile d’y déroger pour des raisons autres que l’ordre public ou la sécurité nationale. C’est pourquoi tout père présumé peut encore refuser un test de paternité auquel on le somme de participer, et ce même s’il s’agit d’un test de paternité légal.

C’est d’ailleurs là bien tout le problème, puisqu’il suffirait alors à un géniteur de mauvaise foi de tout nier en bloc pour faire s’enrayer la machine judiciaire. C’est là que le mode de preuve légal vient à la rescousse du juge, en lui permettant de tirer autre chose du test de paternité que les simples résultats qu’il donne. Notamment, il lui est possible de considérer un refus du père présumé comme un aveu implicite de sa paternité si d’autres éléments du dossier viennent corroborer cette hypothèse. La Cour européenne des droits de l’Homme a réaffirmé ce principe dans un arrêt Canonne c/ France, où le requérant contestait ce pouvoir au juge. Il était invoqué la présomption d’innocence et la garantie de l’intégrité de la personne. Pourtant, les juges communautaires ont considéré que l’intérêt de l’enfant était supérieur à ces considérations, en raison du droit à connaître ses origines mais aussi celui d’avoir un état civil correspondant à la réalité biologique.

Pour ce qui est de l’enfant en revanche, la question se pose différemment. Il faut prendre le problème sous l’angle de sa minorité, ce qui délègue en fait sa capacité de consentement à ses parents (que l’on suppose représenter l’intérêt de l’enfant). C’est la raison pour laquelle on voit souvent des mères demander un test de paternité au nom de leur enfant… alors que l’action appartient à l’enfant en question ! Seulement, il se trouve que l’enfant mineur ne peut agir à ce titre que par le biais de son représentant légal, c’est à dire ses parents connus.