L’arrivée des méthodes de test ADN a radicalement changé la manière de percevoir la preuve en droit de la filiation. Désormais, on dispose d’un outil scientifique pour déterminer la réalité des liens génétiques entre un enfant et un père présumé, à tel point que l’on se demande comment a-t-on pu s’en passer auparavant. Ce fut pourtant le cas à une époque, avec des techniques qui ont pour beaucoup contribué à l’aboutissement sur le test de paternité actuelle. C’est d’ailleurs pour cette raison que d’un pur point de vue probant devant un tribunal, le test de paternité est censé n’être qu’une preuve parmi les autres. Ce qui fait sa force n’est non pas la valeur juridique supérieure qu’il aurait aux yeux du juge, mais la valeur de preuve neutre et scientifique dont il est auréolé par rapport aux autres types de preuve (témoignages, actes administratifs, déclarations des parties…). Qu’en était-il donc lorsque le juge ne pouvait pas réclamer que l’on fasse un test de paternité ?

Bien avant l’arrivée des tests génétiques, chacun a pu remarquer que des ressemblances se retrouvaient entre des parents et leurs enfants. Par exemple, il apparaît tout à fait logique que des parents bruns aient des enfants bruns. C’est sur ces premiers constats semblant de prime abord relever du bon sens que l’on doutait ou non d’une paternité (bien évidemment, ces éléments étaient également liés à des indices contextuels : adultère, adoption, bébés intervertis…). Le problème très évident de cette méthode est qu’elle est loin d’être infaillible, dans un sens comme dans l’autre. Rien n’empêche que deux individus se ressemblent trait pour trait, sans pour autant qu’ils aient de lien de parenté. Inversement, un père et un fils peuvent être complètement différents physiquement tout en partageant le même patrimoine génétique.

C’est pourquoi des études plus poussées ont été faites quant à l’hérédité des personnes. C’est ce qui a pu servir en premier lieu de test de paternité scientifique via le principe de l’exclusion. Très simplement, ce type de test de paternité se base sur des gènes codants tels que la couleur des yeux ou le groupe sanguin. Il est par exemple peu probable d’avoir un enfant de groupe O pour deux parents de groupe sanguin AB, de même pour des parents aux yeux bruns d’avoir un enfant aux yeux verts. Le problème est que « peu probable » ne signifie pas « impossible ». Des exceptions se sont alors révélées au grand jour, telles que le phénotype de Bombay. En outre, cette méthode de test de paternité avant l’inconvénient de n’être qu’exclusive, et pas inclusive. Cela veut dire que des parents aux yeux marrons ne peuvent pas dire par ce biais si l’enfant aux yeux marrons qu’ils élèvent est bien le leur. C’est pourquoi ces travaux sur l’hérédité ont tout naturellement mené vers l’analyse de l’ADN humain que l’on connaît aujourd’hui, afin de différencier chaque individu par un jeu de caractères qui lui sont propres, et non des marqueurs qu’il pourrait aussi bien partager avec une vaste majorité de la population.