Bien qu’ancienne, l’affaire du test de paternité effectué sur le corps d’Yves Montand (de son vrai nom Ivo Livi) joue encore pour beaucoup dans la législation française sur le sujet. Pour comprendre l’origine de cette procédure, il faut remonter au tout début de cette histoire en 1994 où s’est faite jour une action en recherche de paternité. En l’espèce, c’est l’annonce d’Anne Drossart qui a fait grand bruit. Cette dernière prétendait qu’Yves Montand était le véritable père de sa fille, Aurore Drossart, malgré que ce dernier ne soit pas inscrit en tant que tel sur son état civil. Seulement, un gros problème d’ordre matériel se posait : Yves Montand étant décédé en 1991, il était impossible de le confronter pour un test de paternité.

Cette annonce a eu un fort écho médiatique, notamment dans Paris Match qui a titré sur l’affaire en couverture. On pouvait notamment y voir des photos comparatives d’Aurore Drossart et d’Yves Montand, sur lesquelles on pouvait effectivement constater une ressemblance troublante. Mais ces seules déclarations, couplées à cette ressemblance physique indéniable, étaient elles suffisantes pour faire office de test de paternité ? Nul doute que non, et tout le monde s’accordait à dire qu’il fallait des preuves plus solide dans un sens ou dans l’autre. Notamment, Simone Signoret (ancienne épouse d’Yves Montand) aurait déclaré aux Drossart qu’ils auraient été « une famille nombreuse s’ils avaient «dû adopter tous les enfants d’Yves Montand ».

C’est pourquoi une action fut portée en 1994 devant le juge civil, où il fut d’abord considéré qu’Aurore Drossart était bien la fille d’Yves Montand. Pour fonder sa décision, le tribunal avait notamment indiqué que le refus d’Yves Montand de passer un test de paternité était révélateur en l’espèce. Les ayant-droit du chanteur ont contesté cette décision, et c’est à nouveau le juge civil qui a fini par trancher la question de manière radicale : il sera fait un test de paternité pour vérifier si le chanteur est bien le père d’Aurore Drossart. Étant donné que le chanteur était mort en 1991, cela signifiait qu’il fallait procéder à une exhumation de son corps pour procéder aux analyses. Décision terrible, mais apparemment nécessaire puisqu’elle prouvera qu’Aurore Drossart n’est pas la fille d’Yves Montand. Le cas pose de nombreux problèmes, et en premier lieu celui de l’éthique. Par cette action en justice, ce sont les craintes des opposants à ce pendant des lois bioéthiques qui se sont réalisées. Ces derniers craignaient justement que l’on aille déterrer les morts et troubler le repos des familles dans le seul but d’établir la vérité scientifique de la filiation. Ce fut chose faite, puisque le test de paternité prouva que les réclamations des Drossart étaient infondées. D’autre part, la loi précise que le consentement de la personne prélevée doit être exprimé sans ambiguïté ; or, ce sont ici les ayants droit d’Yves Montand qui ont consenti pour lui au test de paternité, ce qui n’a pas manqué de choquer l’opinion publique.

De son côté, Aurore Drossart conteste toujours les résultats de ce test de paternité. Elle invoque notamment le taux d’erreur infime mais possible, ainsi que les conditions douteuses dans lesquelles le test de paternité a été réalisé. Cela n’empêche pas la famille d’Yves Montand de lui réclamer plusieurs dizaines de milliers d’euros, au titre des dépens de justice engendrés par la procédure et des résultats du test de paternité post-mortem, qui viennent infirmer la première décision de 1994.