Le refus de se soumettre au test de paternité : bientôt un délit au Sénégal ?

L’association sénégalaise SET, qui milite pour le droit es femmes, a récemment demandé au gouvernement à ce qu’un important changement soit apporté au corpus législatif sénégalais en matière de paternité. Le projet de loi, dit « papa obligatoire », vise à répondre aux nécessités de la société sénégalaise. Concrètement, les enfants nés sans père reconnu sont marginalisés, et leurs mères souvent seules dans leur combat. Les causes de ces naissances sans filiation paternelle peuvent être de gravités diverses, mais traduisent toutes des malaises auxquels de nombreux sénégalais veulent mettre fin.

Entre autres, une femme enceinte après un viol ne peut avorter, puisque l’IVG est strictement interdite par la loi sénégalaise même dans ce cas précis ; aussi, une jeune femme tombant enceinte par accident se retrouvera seule avec son enfant si le géniteur refuse la reconnaissance. Un autre fléau que vise cette loi est le meurtre à la naissance, dans le cas de pères ne voulant pas assumer la charge d’un enfant non désiré. Le journal Wal Fadjri rapporte ainsi que le projet de loi énonce dans l’exposé de ses motifs : « C’est à la suite de conjonctions sexuelles qu’il y a grossesse. De ce point de vue, il serait injuste de faire payer uniquement à la femme le plus lourd tribut ».

Ce projet de loi est soutenu par de nombreux sénégalais, puisqu’il préfère obliger les hommes à assumer leur responsabilité dans le cas d’une grossesse non désirée plutôt que de revenir sur le sujet sensible qu’est l’interdiction de l’avortement. Le premier grand volet de la loi « papa obligatoire » est la prise en charge gratuite de toute femme enceinte délaissée par le père présumé. Cela implique la gratuité des soins pré-natals, du suivi et de l’accompagnement en structure médicale adaptée, et aussi du test ADN si nécessaire.

C’est sur ce dernier point que le refus de paternité pourrait s’avérer problématique pour les personnes qui refusent de s’y soumettre. Le projet de loi vise à prévoir tous les cas de figure :
– Si le père présumé de l’enfant finit par se déclarer de lui même, l’établissement de la filiation suivra son cours normal.
– Si le père présumé accepte de se soumettre au test de paternité et que le lien est établi avec l’enfant, il sera alors obligé par la justice à payer les frais qui découlent de la grossesse et de prendre à sa charge l’enfant comme tout père de famille.
– Si le père présumé refuse de se soumettre au test de paternité, il peut être poursuivi pour non-assistance à personne en danger. Tout comme en droit français, le refus de se soumettre à un test de paternité sans raison valable pourrait être, dans le cadre de la loi « papa obligatoire », interprété par le juge comme une preuve de paternité.