L’ADN poubelle : est-il vrai que seulement 5 % de nos gènes servent à quelque chose ?

L’idée d’un « « ADN poubelle » ou « trash DNA » en version originale, est une manière quelque peu méprisante de qualifier ce qui est hors des 5 % d’ADN dit « codant ». Cette thèse veut que 5 % d’ADN soient réellement utiles, car seuls ces 5 % d’ADN renvoient à des gènes, et incidemment à des protéines. Le reste est dit « non exprimé » ou « non codant ». Il n’y a de là plus qu’un pas à sauter pour considérer les 95 %% restants de notre ADN comme inutile, incongru ou « poubelle ». Mais ce serait aller beaucoup trop vite en besogne que de considérer cet ADN comme inutile au seul motif qu’on ne peut pas encore comprendre sa fonction ou son fonctionnement.

D’abord, cet ADN non codant reste une composante propre à chaque individu. C’est ce qui permet d’identifier tout un chacun par un test de paternité ou un autre test ADN judiciaire. En l’occurrence, l’ADN non codant est utilisé à des fins de protection de la vie privée et des gènes, afin d’identifier une personne sans la discriminer. Si l’on prenait des gènes codants, il deviendrait possible de dire si la personne analysée est d’origine maghrébine, portoricaine ou asiatique, si ses cheveux sont bruns, blonds ou roux, si ses yeux sont bleus… et c’est bien ce qui a fait débat lorsque la police a établi en France son premier portrait-robot génétique. L’article 706-54 du Code de procédure pénale prévoit ainsi :

« Les empreintes génétiques conservées dans ce fichier ne peuvent être réalisées qu’à partir de segments d’acide désoxyribonucléique non codants, à l’exception du segment correspondant au marqueur du sexe ».

Toutefois, il est évident que cet ADN non codant n’a pas été prévu par la nature pour l’identification judiciaire des personnes dans le respect de la loi informatique et libertés de 1978. On a également découvert que cet ADN non-codant pouvait avoir un certain rôle dans l’apparition de maladies à court ou long terme. Mieux : un projet d’envergure transnationale (composé de 440 chercheurs !) nommé « Encode » a vu le jour. ENCyclopaedia Of Dna Elements a été l’occasion d’une série d’articles émettant des théories encore vagues sur le rôle de tout cet ADN non-codant, qui n’est selon ces scientifiques évidemment pas présent par hasard. On a également découvert que dans cet ADN « poubelle » se trouvaient des gènes directement liés à la formation du visage, ou encore celle du crâne.

Bien que nous ne sachions pas encore à quoi servent exactement toutes les facettes de notre ADN, il est certain que la théorie de l’ADN poubelle ne peut être encore tenue pour vraie et intangible. Les récentes découvertes montrent non pas que 98 % de notre ADN n’est qu’un amas de détritus restants dans les errements de notre évolution génétique, mais au contraire qu’il reste 98 % de notre ADN à découvrir dans un fonctionnement qui diffère de ce que l’on connaît chez les gènes codants. Malgré le séquençage complet du génome humain, l’ADN et ses méandres risquent de nous surprendre pendant encore bien longtemps.