De récentes découvertes sur le site de Lokone au Kenya, éclairent un peu plus les chercheurs sur la parenté génétique des hippopotames. C’est à une équipe franco-kenyane que l’on doit cette découverte réalisée dans le bassin du lac Turkana. Composée de chercheurs du CNRS et d’universitaires originaires de Poitiers et Montpellier, les scientifiques français se sont associés à des chercheurs du National Museum of Kenya pour effectuer des fouilles archéologiques. Lors des recherches, ils trouveront dans le bassin du lac un fossile de mâchoire possédant encore quelques dents.

Un test ADN déterminera rapidement la nature de son propriétaire. Les résultats indiquent en effet que cette trouvaille constitue la découverte d’une nouvelle espèce fossile. Les chercheurs l’ont baptisée « Epirigenys lokonensis ». En turkana, « epiri » veut dire « hippopotame », tandis que « Lokone » est une référence au lieu de la découverte. Dès lors, comment classer cette nouvelle espèce animale ? Il apparaîtrait que ce fossile est au point de vue génétique un parent de l’hippopotame. De là à considérer qu’il est le chaînon manquant pour expliquer l’évolution de cet animal, il n’y a qu’un pas que certains n’hésitent pas à franchir.

Pour resituer le débat, deux grandes écoles divergent sur la parenté génétique de l’hippopotame. Pour la première composée principalement par des archéologues, cet animal est apparenté à la famille des suidés, ou porcins. Pour la seconde qui est plutôt versée sur les tests ADN, , l’hippopotame trouve son ancêtre en la baleine. Les échantillons d’Epirigenys lokonensis ont donc été comparés avec les profils d’anthracotheriidaes, de porcins et d’hippopotame. Les résultats de ces tests ADN ont montré que le spécimen retrouvé au lac Turkana se situe entre les plus vieilles espèces d’hippopotame datant d’il y a 20 millions d’années, et les anthracotères datant d’il y a environ 28 millions d’années.

Cette découverte éclaire un peu plus l’évolution génétique de cette espèce. Epirigenys lokonensis n’est toutefois pas encore l’ancêtre commun tant prisé par les chercheurs, mais une nouvelle étape découverte dans l’évolution de l’hippopotame. On pense donc que cette découverte permettra de mieux identifier l’ascendant génétique commun aux deux espèces. En effet, le fossile du lac Turkana risque de mettre tous les camps d’accord, puisqu’il atteste de traces porcines dans l’arbre génétique de l’hippopotame sans pour autant invalider la théorie d’une origine chez les baleines. Les plus vieux fossiles de cétacés que l’on connaît aujourd’hui remontent à 53 millions d’années, ce qui n’est pas incompatible avec l’histoire génétique de l’hippopotame telle qu’on la suppose aujourd’hui. Jean-Renaud Boisserie du CNRS-université de Poitiers explique ainsi que cette trouvaille éclaire la question de la faune africaine d’un jour nouveau. Si la majorité des espèces qui s’y trouvent aujourd’hui sont d’origine relativement récente (moins de 20 millions d’années), l’hippopotame dériverait d’une lignée d’anthracothères ayant migré de l’Asie vers l’Afrique il y a 35 millions d’années. Cela expliquerait également les dispositions naturelles de l’hippopotame pour la navigation dans l’eau.