Depuis ses premières apparitions dans les procès pénaux des années 80, le test de paternité s’est rapidement vu propulsé au rang de preuve reine par les différents acteurs du monde judiciaire. Pour sa rapidité, sa fiabilité, sa précision et son infaillibilité, il est devenu de plus en plus prisé pour devenir la référence que l’on connaît aujourd’hui. Des structures comme le FNAEG ou le projet Innocence se basent ainsi totalement sur les méthodes de test ADN. Pourtant, cette ascension ne s’est toutefois pas faite sans réserves ou contestations, bien au contraire. Les oppositions frontales à la technique même du test ADN sont rares, et se basent généralement sur la minuscule probabilité qu’il y ait une erreur (et que l’on retrouve par exemple dans les 99,9999% de certitude des résultats d’un test de paternité). En revanche, les accusations à tort à cause d’un mésusage de la preuve ADN sont plus fréquentes. Le raté le plus célèbre à ce sujet reste le fameux « fantôme d’Heilbronn », qui a mobilisé une centaine de policiers entre plusieurs pays européens. Le fin mot de l’enquête a finalement révélé qu’il n’y avait pas de tueur ou de criminel, mais simplement une contamination dès l’usine des écouvillons, qui ont tout de même été emballés et vendus aux différents laboratoires européens. Dans la même veine, l’affaire Nordine Mansouri a révélé un certain nombre d’erreurs commises par les opérateurs humains, et non une erreur purement due à l’utilisation du test ADN. En l’occurrence, il s’agissait ici d’une confusion dans les scellés qui a mené à la même confusion dans les conclusions de l’enquête.

Le test de paternité a connu le même essor en droit civil, où il est devenu la preuve de la filiation par excellence. La faiblesse des modes de preuve précédents tenait en ce qu’ils n’étaient en rien scientifiques, mais purement spéculatifs. Un ou des témoignage(s) peuvent très bien s’avérer être faux, erronés, tronqués, falsifiés… indépendamment de la bonne foi du témoin, ou non. Le juge se doit alors de démêler le vrai du faux, recouper les versions, se faire une vision globale de la chose pour enfin rendre son verdict. L’arrivée du test de paternité dans la procédure civile a considérablement facilité cette tâche, puisqu’elle fait revenir le principe des actions en recherche de filiation à ses fondamentaux : la filiation biologique prime sur la filiation putative. Notons quand même que la Cour européenne des Droits de l’Homme a récemment rendu un arrêt ou elle reconnaissait au juge la possibilité de tirer des conséquences à partir d’un refus de subir le test de paternité. C’est donc un aval donné au juge d’une part pour considérer le test de paternité comme une preuve parmi les autres (malgré un meilleur capital d’objectivité évident), et d’autre part pour imposer la filiation paternelle à un père qui refuse de se soumettre au test de paternité. Ce dernier point consiste en ce que certains appellent déjà « la paternité imposée ». L’expression sous-entend en fait que la réalité biologique prime parfois sur une situation de fait qui est pourtant beaucoup plus profitable à tout le monde.