Le test de paternité légal viole-t-il la Convention Européenne de Sauvegarde des Droits de l’Homme ?

 

En matière juridique, le test de paternité légal est le seul à pouvoir servir de preuve. Pourtant, il est tout à fait légal pour un participant de refuser de s’y soumettre. Dans une telle hypothèse, tout n’est pas perdu puisque le juge peut considérer ce refus de passer le test de paternité comme suspect ; et même tellement suspect, qu’il peut considérer que refuser le test de paternité confirme justement que le père présumé est en fait le père de l’enfant, et ne veut simplement pas se compromettre en permettant aux analyses génétiques de donner un résultat définitif. D’aucuns considèrent une telle pratique comme attentatoire au respect de la vie privée, car elle impose judiciairement la paternité malgré l’absence de résultat du test de paternité. À ce sujet, l’article 8 de la CESDH dispose :

 

« Article 8 – Droit au respect de la vie privée et familiale

 

1Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance.

 

2Il ne peut y avoir ingérence d’une autorité publique dans l’exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu’elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l’ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d’autrui ».

 

Comme on peut le voir, c’est vers les exceptions prévues au second point de cet article que viennent se fonder les justifications des États sur cette pratique en matière de test de paternité. Dans les affaires dans les affaires Mikuli? c/ Croatie, Ebru et Tayfun Engin Çolak c/ Turquie et Canonne c/ France, les juges européens ont par trois fois confirmé la possibilité pour le juge national de tirer des conclusions d’une non-participation au test de paternité. Aux droits du père présumé, la décision de la Cour européenne des droits de l’homme a opposé les droits de l’enfant, tout aussi importants, et notamment :

– Le droit de connaître son ascendance

– Le droit de voir sa filiation reconnue juridiquement

 

Il est toutefois ajouté que la prise en compte du refus du test de paternité comme preuve est acceptable dans la mesure où ce refus vient étayer d’autres preuves. En somme, il serait un peu plus contestable de déclarer judiciairement la paternité d’un homme sur le seul fondement de son refus à passer le test de paternité ; mais si ce refus vient confirmer d’autres éléments, notamment ceux apportés par la partie adverse, alors cette pratique est tout à fait légal, et ne contrevient pas à la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme.