Jack l’éventreur trahi par son ADN ?

Depuis plus d’un siècle, de nombreux enquêteurs amateurs se sont essayé à l’identification du tueur de Whitechapel. En 1888, un tueur en série assassine cinq prostituées dans l’un des quartiers les plus mal famés de Londres. La mort de quelques prostituées était chose courantes, mais les victimes de celui qui se surnomma lui même Jack l’éventreur ont particulièrement retenu l’attention de la police par la sauvagerie avec laquelle elles ont été achevées. Non seulement les cinq femmes ont été éviscérées, mais l’auteur des meurtres a également pris plaisir à narguer la police par des lettres anonymes vantant ses méfaits. Bien que l’authenticité de ces courriers sera postérieurement contestée, il n’en faudra pas plus à la machine médiatique pour s’emballer jusqu’à aujourd’hui encore.

Plusieurs auteurs tels Patricia Cornwell ou Sophie Herfort s’y essayeront avec plus ou moins de succès, mais l’ancienneté de l’affaire rend la tâche très compliquée. La preuve ADN fera alors son apparition dans les extrapolations sur l’identité de l’éventreur, ce qui ne veut pas pour autant dire que le mystère sera résolu. La première utilisation du test ADN pour identifier Jack l’éventreur se fera à partir des lettres reçues par les autorités à l’époque. Plusieurs noms seront proposés pour donner une identité à l’éventreur, mais même ici le test ADN montrera ses limites. Les courriers sont d’origines aussi diverses que contestables. Si on estime que certains ont réellement été écrits par le tueur, on estime que beaucoup d’autres sont en fait des faux montés par les journalistes de l’époque eux-même pour vendre plus de journaux en jouant sur le sordide de l’affaire. Un autre problème est celui de la contamination des preuves. Les lettres sont passées entre tellement de mains pour al plupart, que même si elles comportent l’ADN du tueur, il est mêlé à plusieurs autres dont des enquêteurs et archivistes potentiels.

La dernière tentative en date d’exploitation de l’ADN dans cette affaire revient à Russel Edwards. Il a fondé ses analyses sur un châle, récupéré à l’époque par l’un des enquêteurs sur le corps de Catherine Eddows puis transmis dans sa famille sans qu’il n’aie jamais été lavé depuis. Avec l’aide d’un expert en analyse génétique collaborateur d’Interpol, Russel Edwards analysera les traces de sang et de sperme retrouvées sur le châle. Pour ce faire, il récupérera l’ADN d’une descendante de la victime, et celui d’une descendante du suspect, afin de les différencier sur la pièce à conviction. Le test ADN est positif dans les deux cas. Surgit alors des résultats le nom d’Aaron Kosminski, l’un des principaux suspects que Scotland Yard avait jadis relâché faute de preuves. Russel Edwards appuie cette découverte par les motifs sur le tissu, qui sont des marguerites symbolisant la fête de Saint Michel. Célébrée le 8 novembre chez les chrétiens orthodoxes et le 29 septembre chez les catholiques et protestants, la date correspond également aux meurtres commis par Jack l’éventreur.

Est-ce pour autant la fin du mystère après 126 ans de suppositions hasardeuses ? Pas vraiment, puisque des contre-analyses avancent que le test ADN est erroné. Dans la mesure ou la police ne prélevait effectivement pas l’ADN des suspects en 1888, l’empreinte altérée sur le châle a mené Russel Edwards à vérifier l’ADN mitochondrial. Plus exactement, on reproche à Russel Edwards et son adjoint d’avoir pris des marqueurs génétiques présents chez 99 % des personnes de descendance européenne. Selon les détracteurs de ce test ADN, l’empreinte génétique analysée pourrait donc être celle de n’importe qui, Kosminski ou non.

Suite au prochain épisode.

Lien: http://www.lesechos.fr/27/07/2015/LesEchos/21987-028-ECH_jack-l-eventreur-trahi-par-son-adn.htm