Pourquoi ne peut-on pas demander l’asile en France avec un test de paternité ?

 

Il convient ici de faire une petite distinction, certes subtile mais prenant légalement tout son sens quant au test de paternité. En effet, il est tout à fait possible d’ajouter à sa demande d’asile un test de maternité, mais pas un test de paternité. Pourquoi cette différence, puisque chaque parent est normalement susceptible d’avoir – et donc prouver – un lien génétique avec l’enfant ? Pour comprendre cette différence de traitement, il faut d’abord se référée à l’article 111-6 du CESEDA, qui énonce à ce sujet :

« Le demandeur d’un visa pour un séjour d’une durée supérieure à trois mois, ou son représentant légal, ressortissant d’un pays dans lequel l’état civil présente des carences, qui souhaite rejoindre ou accompagner l’un de ses parents mentionné aux articles L. 411-1 et L. 411-2 ou ayant obtenu le statut de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire, peut, en cas d’inexistence de l’acte de l’état civil ou lorsqu’il a été informé par les agents diplomatiques ou consulaires de l’existence d’un doute sérieux sur l’authenticité de celui-ci qui n’a pu être levé par la possession d’état telle que définie à l’article 311-1 du code civil, demander que l’identification du demandeur de visa par ses empreintes génétiques soit recherchée afin d’apporter un élément de preuve d’une filiation déclarée avec la mère du demandeur de visa. Le consentement des personnes dont l’identification est ainsi recherchée doit être préalablement et expressément recueilli. Une information appropriée quant à la portée et aux conséquences d’une telle mesure leur est délivrée ».

La première remarque est donc que le test ADN vient se joindre de manière subsidiaire aux autres modes de preuve : si l’état civil du pays d’origine le permet ou que les conditions de la possession d’état sont remplies, il n’y aura pas besoin de recourir au test ADN.

L’utilisation ou non du test de paternité dans ce cadre a donné lieu à de nombreux débats, aussi bien en hémicycle que chez les associations de défense des immigrés. Ironiquement, on en est revenu au proverbe latin « mater semper certa est » (la mère est sûre, sous-entendant que le père, lui, ne l’est pas). L’un des risques majeurs mis en avant par les détracteurs du premier projet de loi était le risque que le test de paternité révèle une discordance de paternité, alors que la demande est à la base faite pour un titre de séjour. Le risque de discordance est en effet plus élevé qu’avec la mère, car on retrouve des taux de discordance allant de 0 à 10 % selon les pays envisagés. L’autre problème posé était celui des droits afférents au test de paternité ainsi utilisé, notamment le risque d’inégalité dans le traitement des personnes (entre citoyens français et demandeurs d’asile). C’est pourquoi la question a été tranchée en excluant le test de paternité, et en lui préférant le test de maternité pour toute demande de ce type.